Un roman de l'Amérique :
"Le soupir de la paruline"
Philippe Marchandise
Editions Mols
Avec "Le soupir de la paruline", Philippe Marchandise signe son deuxième roman paru aux Editions MOLS dont nous avons déjà ici souligné le dynamisme éditorial tant en littérature générale (avec notamment les romans d'Elise Bussière et de Michel Goldblat), que dans la bibliothèque des essais, avec les livres remarquables de pertinence et d'érudition critique de Jacques Rifflet. Nous avions rencontré ce dernier lors de la parution de la première édition de ses "Mondes de l'Islam".
Autant le premier roman de Marchandise ("Le jour de l'amélanchier" )s'inscrivait dans l'intime et le singulier, nous racontant le retour à la vie du narrateur, survivant d'une lourde intervention chirurgicale et retrouvant petit à petit le goût et l'essence de l'existence, autant "Le soupir de la paruline" quitte le particulier pour embrasser large et vaste.
L'île de Hilton Head, en Caroline du Sud, est le point de départ et de convergence des souvenirs que convoque le personnage central du roman, Shirley. En trois parties encadrées d'un prologue et d'un épilogue, permettant au romancier d'alterner les points de vue, Marchandise explore ce qui, depuis l'arrivée des premiers passagers du Mayflower, a construit l'Amérique. L'esclavage, la ségrégation, la guerre de sécession, mais aussi le Macacartysme, le procès Rozenberg, les attentats du 11 septembre à New York et tant d'autres événements déposés dans notre mémoire collective surgissent au fil des souvenirs de Shirley. A la fin de sa vie, elle interroge les choix sur lesquels elle a bâti sa famille, mais aussi ce qui a déterminé ces choix: la pression sociale, la pré-éminence d'une soeur, la rupture avec un amour de jeunesse... Tout aurait pu être autre.
De ce roman fleuve, portrait ambitieux d'une Amérique dont on devine combien l'auteur est proche, on retient au fil de la lecture, des figures attachantes, comme celle de Maybel, descendante d'esclaves dont elle incarne le destin et la fierté, celle de John le mari aimant de Shirley, d'Arthur, l'amour de jeunesse et des personnages engendrés par ces vies.
Surgissent aussi, une fois le livre refermé, ces images de l'île de Hilton Head, la passion pour le golf, mille et un détails de la sociologie américaine qui font de ce roman un instrument d'exploration sensible d'une histoire et d'une géographie, celles du nouveau continent, qu'il nous aide peut-être à comprendre en ces temps troublés d'une présidence dépourvue de cohérence.
Jean Jauniaux, le 3 juin 2018
Nous avons rencontré Philippe Marchandise pour évoquer à la fois son oeuvre et sa passion de l'Amérique. Une rencontre en français et/ou en anglais à écouter sur le site sonore de LIVRaisons
Quatrième de couverture
D’une plume fine et érudite, Philippe
Marchandise dresse le portrait d'une certaine Amérique et d'une femme aux
prises avec ses souvenirs, sur une île de Caroline du Sud aussi enchanteresse
que marquée par la Guerre de Sécession. Peut-on aimer deux fois ? est une des
grandes questions qui parcourt ce roman à la fois intimiste et social.
Le chatoyant plumage jaune de la paruline
illumine les paysages de la Caroline du Sud à chaque printemps. Sur l’île
d’Hilton Head, ce passereau migrateur chante à tue-tête toute la journée pour
séduire sa belle.
« Ai-je aimé mon mari ? Ai-je épousé mon amour
? » s’interroge Shirley. Les événements du 11 septembre 2001 ont bouleversé le
monde entier et la vie de cette Américaine, veuve depuis peu. Bien qu’entourée
par ses enfants pour son soixante-dixième anniversaire, Shirley soufre de la
solitude et craint pour son pays, confronté au terrorisme, à la haine raciale
et aux inégalités. Un peu par hasard, elle renoue avec Arthur, l’amoureux de sa
jeunesse, et hésite à le revoir.
Avec cette interrogation, c’est tout le passé
qui rattrape Shirley : ses années de collège en Pennsylvanie, sa rencontre avec
le footballeur roux aux oreilles chiffonnées, l’incompréhensible lettre de
rupture, sa sœur Margaret si distante, son mariage avec John… Et puis
quarante-quatre années de bonheur ont passé dans cette Amérique qui évolue, qui
change et qui chante, et ces années ne s’effacent pas d’un trait. Mais l’île
somptueuse d’Hilton Head où ils ont profité des fairways de golf, des tables de
bridge et des balades au bord de l’océan lui paraît soudain trop étroite.
Trouvera-t-elle la force d’aimer encore une fois ? N’est-il pas trop tard ? La
paruline réenchantera-t-elle à nouveau l’ile par son hymne à l’amour ?