La grâce des jours uniques
Gabriel Ringlet
Eloge de
la célébration
La
parution de son dernier livre en date, nous a donné l’occasion de rencontrer
Gabriel Ringlet au Prieuré de Malèves-Ste –Marie. L’entretien s’est ouvert sur
l’évocation d’Emmanuel Mounier. Le titre du livre est un fragment d’un texte
cité en exergue de l’essai que Gabriel Ringlet consacre aux célébrations :
L’éclat du jour se fera un peu plus vif,
le pommier aura l’air plus heureux, le chêne plus éternel et sur chaque visage
la grâce des jours uniques deviendra quotidienne.
Le
philosophe, fondateur de la revue Esprit
et concepteur du personnalisme
communautaire sera la première des grandes figures qu’évoquera Gabriel Ringlet
au cours de cette rencontre à bâtons rompus. Il y adjoindra bien vite Emmanuel
Levinas et Paul Ricoeur, compagnons de pensée de celui qui convie « des romanciers, poètes, chanteurs, cinéastes
et artistes de tout bord (…) au jeu de ces liturgies hors des sentiers battus. »
Mais
l’essentiel du livre réside sans doute dans la dimension littéraire de la
démarche de Gabriel Ringlet qui reconnaît n’être « plus capable de célébrer sans témoins de l’actualité et créateurs
d’imaginaires ». On sait la volonté d’ouverture de celui qui
revendique celle-ci et dans ses engagements et dans ses livres à commencer par
celui qui le fit connaître du grand public pour ces qualités-là : L’Evangile d’un libre penseu .
Prêtre,
écrivain, journaliste et universitaire, professeur et ancien vice-recteur de
l’Université catholique de Louvain, Gabriel Ringlet est avant tout un homme
engagé dans le monde qui ne cesse d’interroger ses convictions par l’écriture,
de confronter sa foi à la réalité et à l’actualité, de rencontrer l’autre, dans
son individualité et sa différence. Il y a les anonymes qu’il accompagne lors
des célébrations qui sont autant de balises de la naissance à la mort. Il nous
les raconte dans la première partie, Célébrer
le quotidien de La grâce des jours uniques. L’écrivain Ringlet supplante le prêtre,
le témoin, le protagoniste de ces célébrations dont il nous fait ici le témoin.
Ainsi le livre s’ouvre-t-il sur Noé, petit garçon mort-né dont les obsèques
bouleversantes nous aident à comprendre combien le plus humble, le plus injuste
des destins nous inscrit dans la nécessité du rite tel que le revendique
Gabriel Ringlet : Quand j’interroge
mon identité profonde, je crois que je suis fondamentalement célébrant. (…) On
peut vivre sans célébrer bien entendu. Mais pour soulever la vie, pour
l’alléger, pour la porter plus haut et plus loin, nous avons besoin du rite. Il
ne supprimera pas la souffrance, mais il peut éloigner la désespérance (…) Le
rite est une partie de nous-même.
Dans la
deuxième partie du livre, Célébrer les
jours saints, Gabriel Ringlet évoque quelques unes des célébrations par
lequelles il propose que la danse la
peinture, la poésie, la chanson…interrogent l’actualité et labourent l’Evangile.
En associant aux rituels de la Semaine sainte des personnalités aussi
différentes que Bouli Lanners, Magda Hollander-Lafon, France Brel, le clown
Denis Bernard, François Troukens ou Karima Berger (pour ne citer qu’eux), le
prêtre ne vise pas à mettre au goût du
jour (le texte biblique), amis espère bien plus fondamentalement provoquer une
secousse.
Le point
commun des célébrations dont témoigne ici Gabriel Ringlet réside dans ce qu’il
nomme, revendique et prône : « l’affirmation littéraire ».
Jean
Jauniaux
L'entretien avec Gabriel Ringlet est disponible sur le "soundcloud" de LIVRaisons |