Yvon Lammens: filmer avec le coeur... à l'écoute du compositeur Georges Antoine
Lorsque le cinéaste Yvon Lammens s'empare d'un sujet, il le fait à bras le coeur. Les films qu'il consacre à des plasticiens (on se souvient d'un récent et éblouissant portrait de Lionel Vinche - auquel nous reviendrons -, à des écrivains (on lui doit une investigation toute en finesse et subtilité du travail de Philippe Roberts-Jones et nous savons qu'il prépare un documentaire à propos de l'écrivain-orchestre Jacques De Decker) ou à des personnalités hors-norme (comme Micheline Ploumen évoquant la guerre 14-18 de son père), reflètent tous une unité de regard et d'écoute. Lammens est un cinéaste du sensible.
Lorsqu'il est en tournage, on le voit à l'affût de son sujet: attentif au scintillement des yeux, au surgissement d'un sourire complice, à l'émotion d'un souvenir évoqué, il développe l'art de capter l'essentiel des femmes et des hommes auxquels il consacre les films qu'il réalise seul. Ce choix de travailler seul pourrait affaiblir certains, les décourager. Pour Lammens, on dirait que le colloque singulier stimule sa curiosité davantage encore tout en créant les conditions idéales pour la confidence dont se nourrit l'originalité de ses films.
Lorsque le cinéaste Yvon Lammens s'empare d'un sujet, il le fait à bras le coeur. Les films qu'il consacre à des plasticiens (on se souvient d'un récent et éblouissant portrait de Lionel Vinche - auquel nous reviendrons -, à des écrivains (on lui doit une investigation toute en finesse et subtilité du travail de Philippe Roberts-Jones et nous savons qu'il prépare un documentaire à propos de l'écrivain-orchestre Jacques De Decker) ou à des personnalités hors-norme (comme Micheline Ploumen évoquant la guerre 14-18 de son père), reflètent tous une unité de regard et d'écoute. Lammens est un cinéaste du sensible.
Lorsqu'il est en tournage, on le voit à l'affût de son sujet: attentif au scintillement des yeux, au surgissement d'un sourire complice, à l'émotion d'un souvenir évoqué, il développe l'art de capter l'essentiel des femmes et des hommes auxquels il consacre les films qu'il réalise seul. Ce choix de travailler seul pourrait affaiblir certains, les décourager. Pour Lammens, on dirait que le colloque singulier stimule sa curiosité davantage encore tout en créant les conditions idéales pour la confidence dont se nourrit l'originalité de ses films.
Dans les exemples cités, Vinche, Ploumen, Roberts-Jones étaient bel et bien vivants au moment du tournage. Nous étions donc particulièrement intéressés à découvrir le film consacré au compositeur Georges Antoine, décédé quatre jours après l'armistice de la première guerre mondiale. Il avait 26 ans. Il était musicien et avait composé lors des quatre années du conflit une musique qui nous est parvenue plusieurs décennies plus tard lorsque, sur un marche de brocante, une valise dévoile les manuscrits de plusieurs partitions.
Avoir fréquenté la Première guerre mondiale à travers les témoignages de Georges Ploumen auquel il consacre un film, en avoir une connaissance intime à travers les journaux, carnets et photographies de ce soldat à la mémoire duquel sa fille, Micheline Ploumen, dédie les dernières années de sa vie, ont sans doute déclenché chez Lammens l'envie d'aller plus loin dans l'évocation de la Der des Der. (Un livre est publié évoquant cette "Rencontre avec le soldat Ploumen" aux Editions de la province de Liège )
Lammens nous retrace ainsi le destin du compositeur Georges Antoine au fil des images d'archives (des photographies inédites autant qu'inouïes de force et de symbole, comme ces images de crucifix exposés sous les bombardements de l'artillerie), des évocations de la violoniste Shirly Laub, des universitaires Couvreur, Colson et Pirenne. Il choisit avec finesse les extraits de l'abondante correspondance que le musicien échangera avec son frère et avec des amis comme Fernand Duchateau ou Sylvain Dupuis. Nous découvrons ainsi, au gré de ces évocations, la destinée abruptement (et absurdement) interrompue par la maladie, l'épuisement, les blessures. Georges Antoine était volontaire de guerre. Il aurait pu éviter de se retrouver au feu. Il ne l'a pas voulu. On pourrait se demander ce qui a inspiré cette attitude suicidaire autant qu'héroïque. Peut-être est-ce là une énigme dont on doit retrouver la trace dans ce qu'il nous reste aujourd'hui d'une oeuvre en devenir. Il faudra donc, une fois le film vu, écouter la musique dont l'ensemble musical Oxalys nous donne un enregistrement du Quatuor pour violon, alto, violoncelle et piano op 6 en ré mineur et de la sonate pour violon et piano opus 3 en la bémol majeur (Jean-Claude Vanden Eynden piano, Elisabeth Smalt alto, Amy Norrington violoncelle et Shirly Laub violoniste).
Est-ce dans la double lecture que nous offrent le film de Lammens et la musique de Georges Antoine que subsiste cet insatiable aspiration à l'humanisme? Après avoir vu le film, il nous tarde d'écouter ce qu'il nous reste des oeuvres de cet artiste majeur que la guerre a rayé comme tant d'autres de la liste des grands destins dont la furie nous a sauvagement privés.
Voici quelques titres, - on peut ré-écouter certains - grâce à l'enregistrement d'un CD de son quatuor et de sa sonate interprétés par l'ensemble de musique de chambre de Bruxelles Oxalys, Collection 14-18 de Musique en Wallonie - qu'un regard de cinéaste a réveillé en nous ainsi que la grâce dont Georges Antoine irradiait dans ces années meurtries allant de 1914 à 1918 et que bientôt, hélas, nous aurions oubliées s'il n'y avait le travail de documentaristes de l'envergure d'un Yvon Lammens...
Voici quelques titres, - on peut ré-écouter certains - grâce à l'enregistrement d'un CD de son quatuor et de sa sonate interprétés par l'ensemble de musique de chambre de Bruxelles Oxalys, Collection 14-18 de Musique en Wallonie - qu'un regard de cinéaste a réveillé en nous ainsi que la grâce dont Georges Antoine irradiait dans ces années meurtries allant de 1914 à 1918 et que bientôt, hélas, nous aurions oubliées s'il n'y avait le travail de documentaristes de l'envergure d'un Yvon Lammens...
Les sirènes, op. 1 double chœur pour voix
mixtes (1910)
Deux mélodies, op. 2 (1912)
Sonate pour violon et piano en la bémol, op. 3
(1912)
Deux Chansons dans le style ancien, op. 4a
(1912)
Concerto pour piano et orchestre en sol
mineur, op. 5 (1914)
Quatuor en ré mineur, op. 6 pour piano,
violon, alto et violoncelle (1914)
Vendanges, op. 8 (1914-1915)
Mélodies sur des vers de Baudelaire, Corbière,
Klingsor, Samain et Verlaine, op. 4b et op. 7 (1915-1916)
Veillées d’armes, op. 9, poème pour orchestre
(1917-1918)
Mélodies Wallonie, op. 10, Noël et Voici riche
d’avoir pleuré (1918)
Jean Jauniaux, Fichermont, août 18, 2018...
A lire sur la pochette du CD:
Comment composer dans la tourmente ? Qu’écrire
au front ou sur les routes de l’exil ? Pourquoi danser quand tant d’autres
souffrent ? La collection 14-18 propose un portrait musical des années de la
Grande Guerre en enregistrant ces musiques « savantes » et « populaires » qui
surgirent alors que tout art semblait vain, mais qui, l’espace d’un concert ou
d’une soirée, purent servirent de réconfort aux civils et aux soldats de
Belgique et d’ailleurs.
Le premier volume de cette nouvelle collection
est consacré à la musique de chambre de Georges Antoine. Le jeune et prometteur
compositeur liégeois s’engage comme volontaire en août 1914. Envoyé au front,
sa santé se détériore rapidement et il est réformé en mai 1915. Il se fixe en
Bretagne où il compose et organise des concerts au profit des blessés
militaires et pour le secours des pauvres. En septembre 1918, toujours malade,
il remonte volontairement au front. Muté à La Panne, son état de santé
s’aggrave et il meurt à Bruges le 15 novembre 1918.
Tracklisting
Quatuor pour violon, alto,
violoncelle et piano op. 6 en ré mineur
1. Introduction
: Assez lent / Modéré / Animé
2. Assez
lent / Très expressif
3. Animé
Sonate pour violon et piano op. 3 en
la bémol majeur
4. Modéré
/ Animé / Modéré / Animé
5. Assez
lent
6. Résolu
et animé