Du 28 septembre 2019 au 19 janvier 2020, le
Musée de la photographie à Charleroi expose les photographies que Philippe Graton a réalisées lors de séjours successifs (entre 2014 et 2019) à la
« ZAD » de Notre Dame des Landes.
Ces photographies en noir et blanc, captées
sur pellicule argentique sont bien davantage qu’un témoignage sur la société
alternative qui a surgi d’un combat citoyen contre l’installation d’un aéroport
dans une zone où une nouvelle organisation sociale s’est construite, défrayant
la chronique en France et résonnant de nombreux échos dans le monde.
Les soixante photographies exposées
s’accompagnent d’un livre paru chez Filigranes Editions et imprimé –
remarquablement – sur les presses de l’imprimerie Editoriale Bortolazzi Stei àVérone. Ce livre d’art contient en plus des photographies, de très éclairantes
notes prises par le photographe lors de ses différents séjours.
L’ensemble constitué par l’exposition et le
livre, se complètent aujourd’hui par ce long entretien que m’a accordé Philippe
Graton dans son bureau bruxellois. On y entend une véritable master class sur
la démarche et le modus operandi de
Philippe Graton qui, dans cet ouvrage peut-être davantage encore que dans ses
précédents travaux, se révèle un irremplaçable témoin de la société du monde,
en ceci qu’il nous donne à voir et à ressentir les espaces et les sociétés et
les hommes au sein desquels il a choisi de s’immerger, dans la durée et dans
l’empathie, dans l’attention vigilante à tous les signes dont il met en
évidence la gravité, le sens, l’émotion parce que, avant tout, il les raconte.
Le format livre accentue encore cette
sensation de se trouver face à une écriture, véritable, authentique, sensible
et irremplaçable, comme le démontre cette plongée dans la ZAD de Notre Dame des
Landes, pourtant vue et revue à l’envi dans les journaux télévisés jusqu’à ce
que l’Etat français renonce finalement à un projet aéroportuaire d’un autre
temps.
Ce livre, ce reportage, cette histoire sont
nées d’une révolte initiale inspirée à Philippe Graton par la destruction,
à Bruxelles, d’un potager urbain et des cabanes qui ornaient les jardins du
dimanche. C’était en 2009.
Ecoutez le témoignage de Philippe Graton, mais
surtout, regardez ses photographies et lisez celui qui devient écrivain par la
force de l’image.
Jean Jauniaux, octobre 2019
Présentation du livre et de l'exposition sur le site du Musée de la Photographie:
La ZAD* de Notre-Dame-des-Landes, au nord de
Nantes (France), défraie la chronique depuis dix ans. Née d’une opposition à la
construction d’un aéroport dans une zone naturelle protégée, elle est devenue
un lieu d’expérimentation de société alternative, d’agriculture biologique, de
rapports non marchands et d’autres expérimentations sociales qui se poursuivent
après la victoire de cette lutte et l’abandon par l’État français, début 2018,
du projet d’aéroport.
De 2014 à 2019, Philippe Graton a vécu la ZAD
de Notre-Dame-des-Landes de l’intérieur, parvenant à se faire accepter des
militants, photographiant au moyen-format argentique cet univers et la vie
quotidienne de cette société. Cet engagement dans la durée nous donne
aujourd’hui une œuvre photographique exceptionnelle, une restitution unique et
historique de cette expérience marginale dont l’intérêt et les choix de société
qu’elle soulève n’ont jamais été aussi actuels.
L’exposition présente une soixantaine d’images
inédites. Le livre qui accompagne l’exposition révèle, en plus des
photographies, les notes de terrain de l’auteur, à suivre comme une aventure.
Un témoignage unique, différent de tout ce que l’on a pu voir ou entendre sur
la ZAD.
* ZAD est l’acronyme administratif français
pour une " zone d’aménagement différé " destinée à un grand projet de
construction. Les opposants au projet détournent le terme en " zone à
défendre ".